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Lutte pour le droit syndical dans le groupe Azura, Agadir (Maroc)

Global Campaign

Source: Fédération des Syndicats démocratiques

9 novembre 2020

 

 

Abdellah Beibeh, secrétaire général adjoint du bureau syndical dans la ferme Maraissa 9 du groupe agricole Azura, tient un sit-in depuis le 18 septembre 2020 devant la direction régionale de l’entreprise dans la région d’Agadir. Abdellah a déclaré : « Après plus de 23 ans de travail, le groupe Azura me jette à la rue uniquement parce que les ouvriers m’ont choisi comme représentant syndical. Je travaille comme gardien de nuit. Les responsables de la ferme ont changé les horaires de travail à mon insu, et quand j’ai rejoint mon poste à l’heure habituelle, ils étaient là devant la porte pour enregistrer que j’étais très en retard, et ils ont immédiatement pris la décision de me licencier sans me donner le droit de me défendre. C’était un coup monté pour se débarrasser de moi ».

 

Abdellah a épuisé toutes les tentatives pour que la direction revint sur sa décision. Il décida alors de commencer son sit-in durant lequel il a régulièrement été menacé par les gardiens de l’entreprise qui ont aspergé, le 21 octobre, sa petite loge de fortune avec des eaux usées.  Il résiste encore soutenu par une large solidarité dans le cadre la Fédération des syndicats démocratiques.

 

Maraissa 9 est l’une des 47 fermes de production de tomates sous serres, d’une superficie totale de 986 hectares exploités par le Groupe Azura au Maroc, principalement dans la région d’Agadir. Le groupe a exporté un volume de 120 000 tonnes de tomates au cours de la saison 2019-20 (environ un quart des exportations du Maroc de ce fruit), pour un chiffre d’affaires de 304 millions d’euros. Azura possède également d’autres unités de production d’herbes aromatiques fraîches et de fleurs comestibles sur une superficie de 46 hectares. Elle exporte ses produits vers les pays de l’Union européenne, l’Angleterre et la Russie, et dispose de 3 plateformes logistiques en France, au Royaume-Uni et en Allemagne pour distribuer ses produits en Europe et ailleurs.

 

Le Groupe Agricole Azura a été créé en 1988 d’un partenariat entre le Groupe Tazi (une des familles milliardaires du Maroc), et un groupe français. Le groupe comprend Maraissa et Disma, l’une des plus grandes entreprises du groupe, une pépinière commerciale International Nursery qui produit de 10 à 11 millions de plants de tomates par an, une entreprise BioBest Maroc de production des insectes pour la lutte intégrée contre les ravageurs, et Azura Aquaculture pour la production des palourdes.

 

La filière tomate au Maroc emploie 14.168 personnes, 33% d’entre eux ont des contrats à durée indéterminée. Les femmes constituent 38% de femmes des permanents et 32% des saisonniers. Le groupe se vante de son respect du code du travail et des normes sociales, mais la réalité et l’histoire de l’entreprise dans la région d’Agadir montrent son acharnement contre le droit syndical.

 

Depuis le milieu des années 2000, Azura a connu une expansion d’adhésions syndicales contre les mauvaises conditions de travail et le déni des droits, et beaucoup de luttes ont éclaté dans les années 2007, 2008 et 2009. La direction de l’entreprise a riposté par des provocations et des licenciements et a refusé d’ouvrir des négociations sur les cahiers de revendications. Ainsi, il a expulsé 5 membres du bureau syndical de la ferme de Maraissa 9, le secrétaire général de la ferme Maraissa 10, 20 syndicalistes de la ferme Maraissa 15, les membres du bureau syndical de la ferme Maraissa 17 et des ouvriers de la station d’emballage qui ont tenté de créer un bureau syndical. Il a également recouru à l’article 288 du Code pénal pour poursuivre 6 syndicalistes de la ferme Maraissa 15 accusés d’entrave à la liberté de travail dans le but de briser leurs luttes, et il a introduit une société de sécurité privée dans les fermes pour renforcer les pressions sur les syndicalistes. Par ailleurs, Azura bénéficie de l’indulgence des autorités locales pour poursuivre ses punitions collectives. Ainsi, en avril 2014, il a encore expulsé 15 syndicalistes de la ferme Maraissa 9 dont deux membres du bureau syndical.

 

Azura n’est qu’un modèle de ces grandes entreprises agricoles d’exportation qui bénéficient de subventions publiques et d’allègements fiscaux alors que la dépendance alimentaire du Maroc augmente fortement. Ces grands groupes se sont développés aux dépens des petits agriculteurs qui ont été contraints d’abandonner leurs terres en raison des politiques d’ajustement structurel depuis le début des années 80, mais aussi aux dépens des ouvriers agricoles avec des bas salaires et une flexibilité généralisée.

 

Les ouvriers agricoles du groupe Azura ont consenti d’énormes sacrifices pendant près de 20 ans pour défendre le droit syndical. Le sit-in d’Abdellah Beibeh est une continuation de ces batailles, et à quelques mètres près de lui, un autre sit-in d’un ouvrier de la ferme Maraissa 35 qui a été lui aussi expulsé après avoir travaillé pendant 12 ans dans l’entreprise, car il a réclamé son droit à une indemnisation pour son accident du travail qui lui a causé une invalidité de 60% confirmée par les certificats des médecins.

 

Cette lutte pour le droit syndical a Azura une la bataille de toute la classe ouvrière dans ce contexte d’exception sanitaire de covid-19 que les patrons exploitent pour se débarrasser des syndicalistes des ouvriers ayant de l’ancienneté. La solidarité aux niveaux national, régional et international doit être développée sous toutes les formes possibles.

 

 

Pour soutenir cet appel, envoyez un message de protestation a: groupe.tazi@wanadoopro.ma et secretariat@azura-maroc.com

 

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